Bon début de semaine à vous, lectrices et lecteurs.
Je souhaite sincèrement que votre week-end ait été aussi bon que le mien. Sinon, ça sera la prochaine. À l’opposé du sentiment de bien être que le beau temps et le retour à la «normale» donnent à la majorité des habitants du Québec, une des journées de ma vie que je vous raconte peut paraître injuste, choquante ou même scandaleuse pour certains. Ça reste très subjectif.
Il y a prêt de dix ans, je roulais ma bosse tranquillement, me remettant de mes tristes 25 ans. Une année très douloureuse pour moi. J’étais employé dans l’un des magasins d’une célèbre chaîne de supermarché. Me retrouvant avec pas grand-chose pour moi, sauf l’avenir que je devais façonnait de mes mains. Étant bien entouré et ayant réglé quelques comptes avec des personnes, je gravis une à une les échelons du magasin par ma bonne volonté et mon bon travail. Mon attitude s’en trouva plus combative et déterminée.
Un jour, alors que je souriais en travaillant sur un poste que plusieurs convoitaient, mais que j’ai eu, la codirectrice vient me trouver pour me proposer un poste plus permanent, plus important et de mon point de vue, plus prestigieux. Cet évènement tombait à point puisque j’avais encore du mal à me remettre de ma peine d’amour récente. Un vote de confiance qui fait du bien, surtout à la confiance en moi. Un mois plus tard, on me présentait à ma collègue (qu’on appellera Julie pour éviter de créer des conflits). Cette dernière me forme à la tâche importante pour laquelle je me suis engagé et j’en comprends l’importance et les rouages. Je développai également une bonne complicité avec Julie. Tout va bien pendant six ou huit mois. Une fois cette période passée, Julie commence à être de plus en plus absente… Non désolé, je reprends. Elle commençait à avoir des maux de tête et de cœurs qui tombaient toujours lors de la journée la plus occupée… mouain… Résultat : je me tapais ce travail très souvent seul. J’arrivais, à force d’astuce et d’adaptation et un peu de bénévolat, à arriver au bout de la tâche. Je faisais ce que je devais faire.
Malgré mes bons points et mon bon travail, que je faisais de plus en plus seul, la codirectrice me trouvait des failles dans mon travail et des baisses dans ma motivation. C’étaient des reproches tout à fait gratuits et injustifiés. À chaque fois, je revirais la situation de bord et je me permettais même de souligner les exagérations des pauvres arguments de la co-patronne qui semblait mettre les gérants de son côté tranquillement pas vite. Mon attitude combative résistait, ma motivation grandissait, mais ma confiance en moi diminua quelque peu. Je me posais la question à savoir si finalement, je faisais mon travail moins bien que je ne le croyais. Devrais-je faire mon deuil de ce poste que je trouvais prestigieux pour retourner sur l’échelon d’en dessous? Dieu merci, une petite équipe d’élite formée de différents employés de la chaîne passa par mon magasin et remarqua mon dévouement. Un mois plus tard, j’ai pu rejoindre une formidable équipe pour de belles années de travail laissant en arrière de moi les doutes qui commencèrent à me gruger l’esprit. Bien entendu, cette codirectrice ne croyait pas à mon avenir dans cette équipe… J’ai bien su lui faire ravaler ses couleuvres.
Pourquoi est-ce que je vous raconte cette période de ma vie? Où est l’injustice et le scandale dont je parlais?
Tout ça n’était qu’une mise en contexte. L’injustice que j’ai subie était bien la médisance de la part de la patronne. Ce que je n’ai pas précisé c’est que ma collègue Julie est homosexuelle. N’étant pas homophobe du tout, ce point n’a pas fait de vague d’aucune façon pour moi. Même que nous vantions les allures de quelques collègues ensemble. Rien de grossier ni méchant. Seulement des commentaires polis; je vous jure. Nous étions de bons complices, je le rappelle. Le fait que Julie soit aux femmes est important dans l’histoire puisque la codirectrice l’est aussi. Elle ne s’en est jamais caché, la photo de sa partenaire de vie (du moins à l’époque) prônait fièrement sur son bureau.
Lors d’une de mes visites obligatoires dans ce magasin, question de garder mon ancienneté bien à jour, je croisai Julie et j’appris lors de notre conversation que la codirectrice était partie révéler de nouveaux défis ailleurs dans la province. Phrase passe-partout qui veut souvent dire qu’elle n’a pas eu le choix de se trouver un autre emploi. Avant même que je puisse lui partager le fait qu’elle cassait du sucre sur mon dos, elle m’avoua, fière d’elle, qu’elle avait vécu une idylle avec la patronne. En gros, elle a été, pendant près d’un an, sa maîtresse. Elles se voyaient dans le dos de la copine de la codirectrice.
Avant de comprendre pourquoi la patronne me prenait en grippe moi, et non celle de nous deux qui manquait le travail comme bon lui semblait; ce qui me choquait en premier lieu c’est l’infidélité qu’elle faisait subir à sa petite amie. Le choc subit, j’oubliai la codirectrice, sa copine, le travail et tout le reste assez vite.
Je me suis rappelé cette histoire pendant que j’écoutais un podcast (La Soirée est (encore) Jeune) dans lequel Pierre Lebeau raconta que son look bum (manteau de cuir et moto) lui a fait avoir un avertissement de la part de la directrice d’une école de théâtre et que six mois plus tard, il lui faisait des lifts. La codirectrice pilotait une motocyclette; d’où le pourquoi du souvenir revenu. Aujourd’hui ce qui me choque, ce n’est pas l’infidélité, c’est que cette idylle a fait passer l’irresponsabilité de Julie sur mon dos. Pour éviter qu’on la réprimande, j’imagine. J’ai presque hurlé de rage pour l’injustice subite. J’ai rebaptisé la codirectrice pendant dix secondes consécutives et je me suis même demandé si la codirectrice aurait été un codirecteur, les conséquences auraient-ils été pires.
Finalement, je me suis calmé assez rapidement en réalisant que malgré cette injustice (oui, je trouve que c’en ait une pour tous ceux qui vive cette situation) j’ai toujours continué à bien travailler et à garder le moral. J’ai aussi gardé ma combativité en tenant mon bout devant un gérant me demandant d’en faire plus, même s’il savait que j’étais seul pour un travail qui devait se faire à deux personnes. Et cet acharnement de ma part m’a valu de travailler dans le meilleur travail que je n’ai jamais fait. Après être auteur, bien sûr. Je vous parlerais de cette aventure plus tard. Soit ici ou dans un roman.
La morale de cette histoire : j’ai appris que nos accomplissements ne sont pas forcément ceux que l’on croit ou ceux que l’on veut. Malgré cette petite campagne de salissage et le manque de confiance en moi pour l’équipe d’élite (un travail que même les directeurs de magasin voulaient faire) je suis resté trois ans à ce poste avec des gens content de travailler avec moi. Cette période d’injustice m’a permis de mieux m’exprimer au travail, de ne plus douter de moi et de ma façon de faire et surtout de me donner la chance d’essayer. D’abord et avant tout, de choisir mes combats. Dans mon travail actuel, j’ai vécu une autre injustice. Cette fois, j’ai dénoncé le méfait. Le processus terminé n’a pas obtenu le résultat que j’espérai, mais qu’importe. Le problème a été connu et le responsable se tient maintenant très carré. Moi? Je suis retourné à mon ancien poste avec quand même un sentiment de tâche accompli et la confiance zéro affecté. Pour le cas de la codirectrice ayant colporté sur mon cas, ce billet lui donne la dernière attention que je peux lui porter.
Peu importe ce que vous lisez, je vous souhaite une bonne lecture.
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